Cameroun : les mauvaises notes des agences de notation financière
Les réformes économiques engagées par le Cameroun, notamment la régularisation à date de certaines de ses créances tardent à produire des résultats escomptés concordent des agences de notation financière. Dans son rapport publié le 27 juillet 2023, Moody’s Investors Service a rétrograde de deux crans la note du Cameroun qui passe de B2 correspondant à la qualité « très spéculative » à Caa1 qui équivaut à « risque élevé ». Une « mauvaise note » pour expliquer que l’Etat fait actuellement face aux difficultés de trésorerie, notamment les retards de paiement vis-à-vis de certains créanciers.
Selon l’agence américaine, « les paiements manqués sont intervenus après une série de demandes de liquidités adressées au gouvernement, notamment des subventions plus élevées pour le carburant et une augmentation des dépenses hors budget pour des besoins de sécurité croissants ». Une position qui rejoint des craintes émises en mai dernier par ses homologues Standard & Poor’s (S&P) et Fitch Ratings (FR), qui relevaient déjà « les difficultés du Cameroun à honorer ses engagements vis-à-vis de ses créanciers ». Le rapport de Moody’s intervient dans un environnement peu favorable pour le Cameroun qui envisage lancer un emprunt obligataire de 200 milliards de FCFA (336 millions de dollars) d’ici la fin de l’année.
Il ressort qu’en dehors des subventions très élevées de carburant qui engloutissent d’importantes ressources financières, en moyenne 700 milliards de FCFA (1,1 milliard de dollars) en 2022, ce qui a amené le Cameroun sous la pression du Fonds monétaire international (FMI) à réduire les subventions sur le carburant à 300 milliards de FCFA (504 milliards de dollars) en 2023, le Cameroun fait face à des difficultés sécuritaires dans les régions du Nord-Ouest, du Sud-Ouest et de l’Extrême Nord qui constituent un gouffre financier et empêchent ce pays d’honorer ses engagements internationaux. « Ces problèmes de sécurité découragent les nouveaux investissements dans les régions et exercent une pression budgétaire sur le gouvernement pour qu’il augmente les dépenses de sécurité, notamment pour la protection des actifs pétroliers du gouvernement par le biais de dépenses régulières hors budget, » a relevé Moody’s, non sans insister sur le « resserrement des conditions financières mondiales et nationales ».
Par ailleurs, la situation politique du pays est en ligne de mire pour la succession à la tête de l’Etat. A deux ans de la prochaine élection présidentielle, l’âge de l’actuel chef de l’Etat Paul Biya, 90 ans fait partie des éléments d’analyse d’autant que pour Moody’s, « un plan de succession présidentiel crédible et une capacité démonstrative des institutions camerounaises à soutenir une transition pacifique du pouvoir » pourrait conduire à relever la note du pays.
Toutefois, Moody’s estime que le Cameroun dispose de nombreux atouts avec d’importantes richesses minières et de matières premières dont une bonne gouvernance pourrait permettre de changer la donne. Ainsi, « des résultats positifs en matière de crédit pourraient également résulter de progrès plus efficaces dans la capacité de gestion institutionnelle et financière grâce à un engagement continu avec le FMI ». Pour le moment, le gouvernement camerounais n’a pas encore réagi sur ce rapport « prévisible » selon des observateurs.