L’indispensable évaluation
Les Pouvoirs publics ont engagé ou initié depuis quelque temps, une série de réformes, d’échanges et de concertations avec des acteurs politiques, économiques et socioculturels visant de manière globale, l’amélioration des conditions de vie des citoyens. Qu’il s’agisse de l’actualité politique autour de la crise sociopolitique qui secoue les régions du Nord-ouest et du Sud-ouest communément appelée « crise anglophone », qu’il s’agisse des réformes économiques avec l’implémentation du budget-programme, l’import-substitution, des discussions avec les bailleurs de fonds sur le programme des réformes économiques et financières, la lutte contre l’inflation et tout ce qui tourne autour, qu’il s’agisse des mesures pour répondre aux revendications sociales des enseignants, du personnel de la santé et d’autres corps de métier, il est temps de marquer un arrêt pour une évaluation sans complaisance. Sans cette évaluation, la tentative est grande de s’enfermer dans un fourre-tout et de perpétuer l’inaction ou la navigation à vue.
Sur le plan économique et financier, force est de reconnaître qu’en dépit des « assurances » du Gouvernement sur la qualité de signature du Cameroun, l’abaissement consécutif de la note de souveraineté par des agences de notation dédiées est loin d’être une bonne nouvelle. Au fil du temps, on a le sentiment que la situation se complexifie, portant ainsi atteinte à la crédibilité du Cameroun vis-à-vis de ses bailleurs de fonds bilatéraux et multilatéraux. Il faudrait que les gouvernants se montrent moins « bavards » avec des discours tonitruants et pompeux et qu’ils fassent preuve de pragmatisme en vue d’obtenir des résultats probants.
Sur le plan social, le Gouvernement a peut-être oublié la sagesse populaire selon laquelle « qui veut la paix, prépare la guerre ». Une manière de dire qu’il faut savoir anticiper pour contourner des écueils et éviter de se mettre en posture de réactionnaire. De manière récurrente, les mêmes problèmes ou des revendications similaires apparaissent et réapparaissent au gré des circonstances durcissant le front social à cause d’un manque d’anticipation. Le sentiment qui se dégage largement est celui de la politique de l’Autriche, malgré ses limites. Un manque de « sérieux » qui se traduit dans la gestion de la cité et dont l’état de déliquescence des villes camerounaises, en l’occurrence, Yaoundé la capitale et Douala la métropole économique démontre à suffisance, le long chemin qui reste à parcourir pour s’approprier et traduire dans les faits la bonne gouvernance.
Sur le plan politique, au-delà d’un discours dithyrambique sur les « acquis » démocratiques, le travail reste immense pour parfaire les institutions. C’est l’occasion de revenir sur les résolutions du Grand dialogue national (GDN) censé ramener la paix dans les régions du Nord-ouest et du Sud-ouest en butte à des violences sociopolitiques. Quatre ans après la grand’messe, l’application des résolutions reste problématique. Certes, en grande partie à cause des agissements sauvages de ces aventuriers sans foi ni loi qui prônent la partition du pays pour des intérêts inavoués. Toutefois, la responsabilité incombe également aux décideurs qui donnent l’impression qu’il y a des vents contraires au sein de la classe politique dirigeante ce qui a pour effet de retarder la paix et la reconstruction.
Réagissant à la fin desdites assises, le Président Paul Biya s’était pourtant montré assez optimiste : « le Grand dialogue national qui vient de s’achever à Yaoundé, vous a donné l’occasion de réaffirmer une fois de plus, votre attachement à la paix et la concorde dans votre pays, de même qu’à l’unité et au progrès de celui-ci. Vos contributions riches et variées ont été fort utiles. Certaines d’entre elles ont inspiré les recommandations formulées à l’issue du dialogue ». Fort de la pertinence des résolutions, « je puis vous assurer que toutes feront l’objet d’un examen attentif et diligent dans la perspective de leur mise en œuvre, en tenant compte de leur opportunité et de leur faisabilité, mais aussi des capacités de notre pays », relevait le chef de l’Etat.
Vivement que ceux qui sont en charge d’appliquer ces résolutions prennent la mesure de leurs responsabilités et qu’ils daignent rendre compte aux Camerounais. Encore que ceci rentre dans l’ordre des obligations républicaines, tout au moins, pour ceux des dirigeants pour qui gouverner, c’est prévoir.